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Kosovo : le premier ministre attribue à la Serbie une attaque sur le système énergétique du pays

Le Kosovo a renforcé, samedi 30 novembre, la sécurité autour de ses « installations critiques » à la suite d’une explosion qui a endommagé, vendredi, un canal d’eau vital pour le refroidissement de ces deux centrales thermiques. Le chef du gouvernement kosovar a accusé la Serbie d’avoir « orchestré » cette « attaque », ce que Belgrade a démenti.
A la suite d’un conseil de sécurité présidé par le premier ministre du Kosovo, Albin Kurti, dans la nuit de vendredi à samedi, le gouvernement kosovar a affirmé dans un communiqué que « les premières indications suggèrent » que cette explosion a été « orchestrée par l’Etat serbe, qui est doté des capacités pour mener une telle attaque criminelle et terroriste ». Dans ce contexte, le conseil de sécurité a « approuvé des mesures supplémentaires pour renforcer la sécurité autour des installations et des services essentiels, tels que les ponts, les transformateurs, les antennes, les lacs, les canaux, etc. », a précisé le gouvernement.
Mais la Serbie a dénoncé samedi des « accusations sans fondement », « irresponsables » et « inquiétantes », selon une déclaration du président serbe Aleksandar Vucic transmise à l’Agence France-Presse (AFP), niant « sans équivoque toute implication » dans cette attaque.
Un peu plus tôt dans la matinée, le ministre des affaires étrangères serbe, Marko Djuric, avait dénoncé un « acte de sabotage inacceptable ». « Nous appelons toutes les parties à résister aux provocations et à privilégier le dialogue, la compréhension mutuelle et la coopération », avait-il souligné sur le réseau social X, tout en sous-entendant que le « régime » kosovar pourrait être « potentiellement impliqué » dans l’attaque.
Les tensions entre le Kosovo et la Serbie persistent depuis la guerre entre les forces serbes et les Kosovars à la fin des années 1990. Le Kosovo a déclaré son indépendance en 2008, une décision que la Serbie refuse de reconnaître.
La « destruction » du canal a été dénoncée « avec la plus grande fermeté » par le principal parti politique des Serbes du Kosovo, la Liste serbe, proche de Belgrade. « Nous voulons dire clairement que cet acte va absolument à l’encontre des intérêts du peuple serbe et nous réclamons à la KFOR [la Force pour le Kosovo, mise en place par l’OTAN] et à Eulex [la Mission Etat de droit de l’Union européenne au Kosovo] de mener une enquête en urgence », a annoncé le parti dans un communiqué.
Aivo Orav, le chef de la délégation de l’Union européenne au Kosovo, a dénoncé sur le réseau social X « l’attaque (…) qui prive d’eau une grande partie du Kosovo ». « J’ai déjà proposé l’aide de l’Union européenne aux autorités du Kosovo. L’incident doit faire l’objet d’une enquête et les responsables doivent être traduits en justice », a-t-il ajouté. Le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, a condamné samedi l’attaque : « Il s’agit d’un acte abject de sabotage contre les infrastructures civiles essentielles du Kosovo, qui fournissent de l’eau potable à une partie considérable de la population », a écrit le responsable espagnol dans un communiqué, dénonçant aussi « une attaque terroriste ».
La France a aussi réagi : « Cet attentat aurait pu avoir des conséquences considérables, notamment sur l’approvisionnement en eau et en électricité du Kosovo », a souligné le ministère des affaires étrangères dans une déclaration, demandant que « les auteurs soient traduits devant la justice kosovare ». La France « exprime sa solidarité avec le Kosovo et sa disponibilité à lui apporter une assistance », et « salue la volonté exprimée par les autorités serbes de coopérer à la recherche des coupables de cet attentat qu’elles ont condamné ».
Les Etats-Unis, par leur ambassade à Pristina, ont aussi fermement condamné « l’attaque contre des infrastructures critiques au Kosovo ». « Nous suivons la situation de près (…) et nous avons offert notre soutien total au gouvernement du Kosovo pour veiller à ce que les responsables de cette attaque criminelle soient identifiés et tenus de rendre des comptes », a déclaré l’ambassade sur Facebook.
L’explosion du canal, qui alimente en eau deux centrales électriques au charbon pour leurs systèmes de refroidissement, représentant la principale source d’électricité du Kosovo, s’est produite près de la ville de Zubin Potok, dans le nord du pays, une zone peuplée essentiellement par des Serbes. Samedi matin, le chef du gouvernement kosovar en visite sur les lieux a précisé qu’« environ un quart » du flux habituel en eau passant par le canal était rétabli, saluant « l’engagement de tous les services compétents ».
Des raids ont été menés « dans 10 endroits » et « 8 personnes ont été arrêtées […] soupçonnées d’avoir participé à des activités criminelles et terroristes », a déclaré le ministre de l’intérieur kosovar, Xhelal Svecla, tandis que le directeur de la police, Gazmend Hoxha, annonçait la saisie de « 200 uniformes militaires, 6 lance-grenades, deux fusils, un pistolet, des masques, des couteaux ».
L’attaque de vendredi suit une série d’incidents violents dans le nord du Kosovo, où les Serbes sont majoritaires, en particulier des grenades lancées contre un bâtiment municipal et un poste de police en début de semaine. Elle survient alors que des élections législatives doivent se tenir le 5 février 2025 au Kosovo.
Malgré l’indépendance du Kosovo, la Serbie a maintenu dans les zones serbes du pays des institutions publiques dites « parallèles », les écoles, les hôpitaux, voire une administration publique. Mais le démantèlement récent de cette administration par le gouvernement d’Albin Kurti a ébranlé ce système et ravivé les tensions.
Le Monde avec AFP
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